Pirate

Il était une fois, au cœur de la mer des Monstres, naviguait un bateau au pavillon noir pirate. Son capitaine était réputé pour être une crapule ne laissant aucune chance aux navires marchands croisant son chemin. Il pillait, volait, mais ne tuait pas, tel était son credo. L’or et les biens se retrouvaient. Pas la vie. Cela n’avait néanmoins pas freiné les recherches de la marine à travers les eaux du monde entier pour occire une bonne fois pour toute ce maudit pirate, ainsi que tout son équipage.

Le capitaine avait bien conscience que ses jours étaient comptés. Il s’était fait trop d’ennemis au fil de ses aventures, trop de récompenses pesaient au dessus de sa tête. Et puis, il se faisait vieux. Son cœur appartenait aux eaux capricieuses des océans, mais son corps supportait de moins en moins les assauts des vagues contre la coque de son navire, les combats lors des abordages et les nuits de tempête. Il ne pouvait pourtant se résoudre à tirer sa révérence. Il lui fallait toujours plus de quêtes, de butins à récolter et de plages à découvrir.

Bien décidé à trouver un nouveau trésor d’exception, il s’était rendu auprès d’une sorcière des terres sauvages, perdue au milieu d’une sombre forêt de bambous à l’autre bout du monde connu. La questionnant sur ce qu’il pouvait découvrir de plus précieux sur terre, elle lui avait répondu : « Trouve l’île aux oiseaux, à l’est du continent Noir. Nulle carte ne pourra t’y conduire » ajouta t-elle, anticipant la question du pirate « mais il existe une formule qui te permettra de trouver ton chemin. »

Le capitaine observa l’étendue bleue infinie devant lui, une main accrochée au gouvernail. A mesure que la nuit tombait, l’obscurité engloutissait l’horizon, lui conférant une aura aussi inquiétante que familière. Et lorsque la première étoile perça le voile opaque des cieux, le pirate descendit dans sa cabine en se répétant mentalement la formule de la sorcière. L’air déterminé, il se plaça face au miroir accroché au mur en bois, puis pensa avec toute sa détermination à l’île aux Oiseaux avant d’abattre violemment son poing dans son reflet. Le miroir se brisa en mille morceaux sur le sol du navire, aspergé ça et la de petites gouttes de sang s’écoulant des jointures abîmées du capitaine. Il attendit quelques secondes, puis la magie opéra : dans un bourdonnement, les fragments scintillants du miroir se rassemblèrent pour former un minuscule oiseau de cristal teinté de pourpre. Ses ailes battirent l’air et il s’envola vers le pont du navire, suivit par le capitaine qui hurla à son équipage : « Suivez l’oiseau, bande de marins d’eau douce !»

Le voyage ne dura pas plus d’une semaine. Après avoir contourné le continent Noir, l’oiseau les conduisit droit vers une petite île : l’île aux Oiseaux. Le navire n’avait pas accosté que déjà, le capitaine pu constater que ce n’était pas le hasard qui avait nommé cet endroit : des milliers d’oiseaux de toutes les tailles et de toutes les couleurs survolaient l’île et ses alentours en battant des ailes aux plumes scintillantes. L’équipage resta muet d’admiration face à ces innombrables volatiles qui semblaient tout droit sortis d’un rêve. Mais la faim les ramena à la réalité, si bien qu’après avoir mis pied à terre, le capitaine leur ordonna d’aller chercher des vivres dans la forêt. Désormais seul, il repéra du coin de l’œil l’oiseau miroir qui semblait l’attendre non loin de là. Le capitaine entreprit de le rejoindre en grimaçant, sa hanche devenue douloureuse suite à une énième chute lors d’une tempête essuyée par le navire. Boiteux et fatigué, il arriva finalement à hauteur de l’oiseau qui se posa alors sur son épaule et gazouilla mélodieusement à son oreille. « Oui, oui tu as raison petit, je vais me reposer un peu... » souffla le pirate.

Il repéra un palmier au tronc légèrement courbé, parfait pour s’y adosser en s’asseyant dans le sable chaud de la plage. Le capitaine poussa un soupir de confort en sentant ses muscles se dénouer, puis plongea ses yeux couleur d’ambre vers son amour de toujours : l’océan. Il inspira longuement l’air marin, savoura le chatouillement des grains dorés contre ses paumes ridées puis, bercé par le chant d’un millier d’oiseaux, il s’endormit.

Lorsque l’équipage le retrouva, le capitaine ne respirait plus. L’oiseau miroir avait cessé de bouger, reposant sur son épaule comme un compagnon fidèle. Le brave pirate s’en était allé. Ses hommes s’agenouillèrent alors face à celui qui les avait commandé de si nombreuses années et son second murmura : « Le capitaine a finalement trouvé le plus beau des trésors les gars : le sommeil éternel face à l’océan. » Et comme pour lui répondre, les oiseaux gazouillèrent joyeusement à l’unisson.

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1 commentaire

J’aime beaucoup ce conte

Françoise Bianchi

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